Pour gagner
cette guerre, les publicitaires doivent influencer et persuader les individus de
modifier leurs opinions et leurs choix de consommateurs. Toutefois, le pouvoir
persuasif de la publicité ne repose pas sur les qualités réflexives de l’âme,
ni sur son intuition, mais sur l’utilisation des sympathies et des antipathies de
l’homme, de ses sentiments, et du développement des techniques de marketing et de
l’utilisation des bases de données afin de piéger les individus.
Le désordre publicitaire
La
publicité n’est pas essentiellement mauvaise, mais dans notre époque, son
omniprésence la rend mauvaise. Que cela
soit dans les toilettes, sur les autobus, à la télévision, sur internet, nos
sens peuvent difficilement s’en échapper plus que quelques heures. La publicité
engendre alors un ensemble de représentation mentale artificielle, et par un effet
de débordement, elle participe à l’exacerbation de l’ensemble des désirs. Ainsi,
si la publicité de telle marque de voiture ne fait pas acheter plus de
voitures, mais l’ensemble des publicités de voiture représente un mantra hypnotique qui encourage l’utilisation
et l’achat de la voiture. La publicité, comme phénomène global, permet de
maintenir vivant le mythe de la liberté par la consommation et les idéologies
qui s’y rapportent.
Le phénomène
publicitaire n’est plus ordonné à la mesure de l’homme entier, ce qui inclut le
divin. Mais c’est l’expression du refoulement de ce qui est transcendant. La
publicité ne répond qu’aux besoins mineurs et non essentiels de l’homme. Elle
est la manifestation de la licence morale et spirituelle qui accompagne
l’individualisme philosophique,
corollaire à la démocratie libérale.
La
consommation ne constitue pas un problème, la consommation n’est pas un mal en
soi. Toutefois, c’est sa démesure qui est le problème.
La violence publicitaire
Et, la publicité est violente! L’omniprésence de la publicité constitue une violence acceptée socialement; elle ne brise aucun os, et, pourtant, elle enchaîne l’homme dans une prison invisible d’attentes et de fantasmes. Elle ne fait pas appel à l'intelligence et à l’intuition. L’espace mental naturel nécessaire à l’homme pour être libre, elle le souille. Elle cherche à séduire. Pour cela, elle peut faire rire, elle peut éveiller la sensualité, elle peut chercher à enflammer l’orgueil, ou la vanité, ou la vantardise.
Alors, comment pouvons-nous qualifier une
industrie qui utilise la misère des gens contre eux-mêmes afin de les piéger? Nous
ne pouvons que la qualifier de violente!
Et, la publicité est violente! L’omniprésence de la publicité constitue une violence acceptée socialement; elle ne brise aucun os, et, pourtant, elle enchaîne l’homme dans une prison invisible d’attentes et de fantasmes. Elle ne fait pas appel à l'intelligence et à l’intuition. L’espace mental naturel nécessaire à l’homme pour être libre, elle le souille. Elle cherche à séduire. Pour cela, elle peut faire rire, elle peut éveiller la sensualité, elle peut chercher à enflammer l’orgueil, ou la vanité, ou la vantardise.
La
publicité s’impose à l’homme, son consentement est secondaire. De toute façon,
nous sommes avides de nouveauté. Son objectif est de pénétrer dans l’esprit de
l’individu et d’y faire sa résidence. Si pour l’homme dépendant au sexe, une
seule image peut lui éveiller un désir. Pour l’homme qui ne possède pas de
passion apparente, il faudra s’imposer à lui par un refrain qu’on n’oublie pas,
l’humour, par n’importe quel artifice qui permettra que dans une semaine, un
mois, un an germe un de ces désirs.
Ce battage
publicitaire, comme il est souligné plus tôt, s’il n’arrive pas à créer de
nouveaux désirs, légitimera la surconsommation, et nous fera oublier son
caractère tout à fait scandaleux. À ce sujet, soulignons que Locke dans son Traité du gouvernement civil souligne que
dans l’état de nature l’ensemble de la création est détenu en commun. Mais, ce qui
est le fruit du labeur et de l’industrie de l’homme, cela lui appartient de
droit. Toutefois, cela est vrai, tant que l’homme jouit de ses biens dans les
limites de la raison. Ainsi « si l’on
passe les bornes de la modération, et que l’on prenne plus de choses qu’on n’en
a besoin, on prend, sans doute, ce qui appartient aux autres », à ce
moment, on met en danger la vie d’un autre homme et on perd le droit de jouir
de ce bien.
La publicité
vise nos défauts et nos failles. Elle tourne nos instincts contre nous. Si, un
homme souffre d’un orgueil démesuré. Que lui arrivera-t-il, si on lui présente
constamment des images d’homme riches avec telle marque de voiture? Pour un
autre ayant des problèmes avec les jeux de hasard, une petite publicité
alléchante sur les nouvelles tables de black-jack l’incitera à aller dans un
casino. On le sait, on le voit, pour certaines jeunes filles, leur désir de reconnaissance
les poussera à rassembler à un modèle féminin stéréotypée et hypersexualisée. Pour
chaque faiblesse psychologique, on retrouve un piège médiatique afin de
s’imposer à l’âme de l’individu. Si l’âge adulte peut calmer cette suggestibilité
à la publicité, ce sont tout de même, les individus les plus fragiles qui
peuvent s’y faire prendre.
Ulysse et les sirènes |
Et le chrétien?
Jésus entra dans le temple et chassa tous ceux qui vendaient et achetaient
dans le temple;[…] : Ma maison sera appelée maison de prière; mais vous,
vous en faites une caverne de voleurs. " Mathieu 21,12
La maison
de Dieu est l’âme de l’homme, car c’est en esprit et en vérité que le chrétien
doit adorer Dieu afin que celui-ci puisse y manifester sa présence. Pour cela,
il faut que l’âme soit vide afin que le Seigneur puisse y exercer sa
souveraineté. Car, Dieu est jaloux et son trône est notre âme. Ainsi, il est plus facile de percevoir l’utilité
de l’ascèse. Celle-ci doit libérer l’âme de la présence de
la créature afin d’y établir le trône vide de Dieu. Et, il est doublement
pertinent de faire une ascèse mentale vis à vis des suggestions externes.
Car, l’homme
qui ne prête pas attention est semblable à un château fort dont le pont-levis
est descendu, et qui n’est pas gardé. À ce moment, des brigands peuvent y
entrer, fréquenter les tavernes et y ravager sa cité. L’âme de l’homme finit
par être encombrée du bruit et de l’agitation de ces brigands, et de tous les
désirs nouveaux de l’homme. Bref, c’est tout un capharnaüm qu’est devenue l’âme
de l’homme. Dans ce cas, l’appel à la prière ne peut plus être entendu, c’est pourquoi
pour le chrétien, la publicité est un
danger. Car l’homme, et c’est naturel, sera appelé à désirer un moment donné
ces biens. Tous les hommes de chair ont leur point d’achoppement. Mais, le chrétien devra livrer le combat, il
devra patienter et accepter cette souffrance, peut être même succombera-t-il. C’est une souffrance qu’il aurait peut-être mieux fait d’éviter.
Si l’homme
veut garder sa liberté, car tout ce qui est bon cherche à libérer l’homme de
ses prisons spirituelles, l’esprit doit abattre le vacarme des réclames afin
qu’il puisse se dresser comme une forteresse au milieu de ce brouhaha publicitaire. Car, les subtiles violences
sont toujours plus perverses que les apparentes.
« Qu’est-ce qu’un esprit libre? Un esprit
libre est celui qui n’est troublé par rien et n’est attaché à rien, qui n’a lié
le meilleur de lui-même à aucun mode et ne songe en rien à ce qui est sien;
complètement englouti dans la très chère volonté de Dieu, il est sorti de
lui-même ».
-
Maître Eckhart
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