Gustave Thibon : Principe et personnalité
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Gustave Thibon |
"Dans les époques
classiques, les institutions morales, politiques ou religieuses dépassaient et
portaient les individus qui les représentaient. La monarchie était plus que le
roi, le sacerdoce plus que le prêtre. A telle enseigne qu’on pouvait alors se
payer le luxe de mépriser tel roi ou tel pape sans que le principe même de la
monarchie ou de l’autorité pontificale soit mis en question le moins du monde. Qu’on
songe aux invectives d’une sainte comme Catherine de Sienne contre le clergé
de son temps, à un grand catholique comme Dante qui colloquait en enfer le
pape alors régnant! Aujourd’hui, comme dans tous les temps de décadence, nous
assistons au phénomène inverse : les institutions ne sont tolérées et aimées
qu’à travers les personnes : c’est pourquoi, soit dit en passant, nous avons
besoin, plus que jamais, de chefs politiques et religieux intègres et
vigoureux. Plus que jamais, le chef qui manque à sa mission compromet, en même
temps que sa personne éphémère, le principe éternel qu’il représente. Il est un peu angoissant de voir de faibles individus porter sur leurs épaulés
tout le poids des cadres sociaux. Croit-on que les Italiens et les Allemands d’aujourd’hui
soient tellement attachés au principe de la dictature ? Pas du tout ; c’est la
personne de Mussolini et de Hitler qu’ils adorent. Et croit-on
aussi à la possibilité actuelle d’un anticléricalisme qui ne soit pas, en même
temps, antireligieux ? Hélas ! il devient de plus en plus difficile de séparer
la cause des institutions de la cause des personnes..."
-Gustave Thibon (Ce que Dieu a uni, essai sur l'amour)
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