samedi 18 décembre 2010

Gustave Thibon : Principe et personnalité

Gustave Thibon
"Dans les époques classiques, les institu­tions morales, politiques ou religieuses dépassaient et portaient les individus qui les représentaient. La monarchie était plus que le roi, le sacerdoce plus que le prêtre. A telle enseigne qu’on pouvait alors se payer le luxe de mépriser tel roi ou tel pape sans que le principe même de la monarchie ou de l’auto­rité pontificale soit mis en question le moins du monde. Qu’on songe aux invectives d’une sainte com­me Catherine de Sienne contre le clergé de son temps, à un grand catholique comme Dante qui col­loquait en enfer le pape alors régnant! Aujourd’hui, comme dans tous les temps de décadence, nous assis­tons au phénomène inverse : les institutions ne sont tolérées et aimées qu’à travers les personnes : c’est pourquoi, soit dit en passant, nous avons besoin, plus que jamais, de chefs politiques et religieux intègres et vigoureux. Plus que jamais, le chef qui manque à sa mission compromet, en même temps que sa personne éphémère, le principe éternel qu’il représente. Il est un peu angoissant de voir de faibles individus porter sur leurs épaulés tout le poids des cadres sociaux. Croit-on que les Italiens et les Allemands d’aujour­d’hui soient tellement attachés au principe de la dic­tature ? Pas du tout ; c’est la personne de Mussolini et de Hitler qu’ils adorent. Et croit-on aussi à la possibilité actuelle d’un anticléricalisme qui ne soit pas, en même temps, antireligieux ? Hélas ! il devient de plus en plus difficile de séparer la cause des insti­tutions de la cause des personnes..."


-Gustave Thibon (Ce que Dieu a uni, essai sur l'amour)

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